« Les soldats du Califat » ont-ils la possibilité de supplanter AQMI dans le Sahel et quelles seraient les conséquences d’une telle évolution ?
Les « soldats du califat » sont estimés pour l’instant à une centaine de combattants, mais les défections dans les rangs d’AQMI, pourraient leur profiter.
• L’argent n’est plus un problème.
AQMI se finance essentiellement grâce aux prises d’otages moyennant rançons et aux trafics de tous genres. Daesh est considéré comme étant le groupe terroriste le plus « riche au monde », il se serait constitué une importante manne financière, estimée à 2,3 milliards de dollars .
Ces fonds proviennent des pillages de banques, comme ce fut le cas à Mossoul dans le nord de l’Irak. Il y a également la vente du pétrole issu des raffineries de Syrie et d’Irak et enfin, il y ales aides apportées par les réseaux.
Le groupe n’a pas encore demandé de rançon pour les otages, et depuis plusieurs mois, il s’illustre par des décapitations et des occupations territoriales. « Avec l’Etat Islamique, on ne négocie pas, on tue » disait l’ancien premier ministre français François Fillon, lors du débat sur l’intervention de la France contre Daesh. (24/09/2014 assemblée nationale française)
• Recherche de notoriété.
En appelant à l’assassinat d’occidentaux et particulièrement de citoyens français par tous les moyens, le Califat cherche à devenir une franchise de Daesh. Le but est de faire en sorte que des groupes mal intentionnés commettent des crimes en son nom.
• Le Sahel n’est pas totalement à l’abri
Si l’allégeance d’AQMI à Al Qaeda central, était passée inaperçue en 2006, dans certains pays de la zone sahélo-saharienne, la naissance des « soldats du califat » et son allégeance à Daesh doivent faire l’objet de toutes les attentions.
Les « soldats du Califat» pourraient se déployer dans la bande sahélo-saharienne. De nombreux groupes terroristes trouvent qu’AQMI n’est plus suffisamment actif.
Certains jeunes africains, ayant pris le chemin du retour en provenance de la Syrie, pourraient à terme « représenter Daesh » dans le Sahel.
Egalement, la fortune de Daesh, pourrait inciter de nombreux groupes locaux à le rejoindre.
Le renforcement des « soldats du califat », représenterait une menace importante pour les pays du Sahel.
Certaines zones, comme le nord du Mali, pourraient constituer des proies plus ou moins faciles pour l’organisation.
• La faiblesse de Daesh pourrait limiter l’évolution des « soldats du califat » dans le sahel.
Daesch est détesté par plusieurs groupes terroristes, qui trouvent en son chef Abou bakr al-Baghdadi, un imposteur et un personnage narcissique. Le fait qu’Al Baghdadi se soit auto-proclamé « calife » et ait pris le prénom d’Abou bakr As-Siddiq, qui fut Calife de l’Islam de 632 à 634, n’a jamais été digéré par les autres groupes.
En réalité, cette rivalité entre les dirigeants de groupes terroristes, n’est pas liée à l’Islam, mais plutôt à la frustration personnelle des uns et des autres.
La détestation de Daesh par les autres groupes pourrait limiter l’évolution rapide des « soldats du califat » dans le Sahel.
• L’obligation d’une stratégie collective des Etats de l’espace sahélo-saharien.
Les Etats de la zone sahélo-saharienne doivent nécessairement développer une stratégie commune afin de lutter contre le renforcement des « soldats du califat ».
Une défaite de Daesh central au Moyen Orient, pourrait pousser ce dernier à renforcer ses positions dans le Sahel.
Le défi est important pour les Etats sahélo-sahariens, peu organisés et aux ressources financières indigentes. Ils doivent se doter à court terme d’un efficace dispositif sécuritaire commun.
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