POURQUOI LA PEREVENTION DE L’EXTREMISME VIOLENT DEMEURE UN VOEUX PIEUX

Sous cette nouvelle houlette, les pays du Sahel Sahara et d’Afrique du Nord, a l’instar d’autres pays sous d’autres cieux, ont multiplié les rencontres et colloques, adopté des plans d’actions et pris des mesures tous azimuts pour confronter  individuellement et conjointement cette gangrène transnationale.


Lors d’un forum tenu à Tunis les 7-8 décembre dernier, des experts francophones en la matière,  des leaders de la société civile, y compris des femmes et des jeunes,  se sont penchés sur les voies et moyens de privilégier la prévention précoce dans lutte contre l’extrémisme violent. Ils ont fait valoir que la prévention libère les décideurs de la tyrannie de l’urgent et permet, au delà des mesures sécuritaires immédiates, d’élaborer des stratégies à long terme qui traitent les facteurs sous-jacents qui nourrissent la radicalisation et la violence organisée. Parmi ces facteurs  les suivants ont été évoqués : le dépérissement de l’Etat et ses institutions, des élites éprises  plus par le pouvoir que par le soucis de servir, l’absence d’une vision rassembleuse, la corruption et l’injustice sociale, le chômage qui frappe les jeunes en particulier, des politiques d’exclusion, la non-maitrise du champs religieux, le manque d’espaces pour le débat franc de la chose publique et le sacrifice sur l’autel de la stabilité et de la sécurité,le rétrécissement des libertés fondamentales etle recul de l’état de droit. Tous ces facteurs, associés à la mauvaise gouvernance, créent à terme, un terroir favorable à l’éclosion du radicalisme violent et du terrorisme.


Les considérations géopolitiques ont été également abordées dans les discussions de Tunis comme des facteurs qui contribuent ou inhibent l’action contre l’extrémisme violent. Mais elles n’étaient pas traitées avec la candeur ni la rigueur qu’elles méritent, d’autant plus que ces facteurs ne sont des secrets pour personne même  s‘ils échappent souvent à  la maitrise des États en raison de leur nature exogène et pernicieuse.


Plusieurs raisons militent contre une contradiction franche de ces considérations géopolitiques. J’en cite, seulement deux.


La première est qu’une analyse sans ambages de ces facteurs géopolitiques risque de mettre au grand jour l’identité des Etats et les élites bien nanties qui  financent les mouvements radicaux et les médias puissants qui empoisonnent les esprits des jeunes et des sans-espoirs qui continuent à renflouer les rangs des ces mouvements.  Il est évident que les Etats inféodés à ces puissants acteurs font tout  pour contredire ces vérités.


La deuxième est qu’une étude approfondie des causes sous-jacentes court le risque de ressusciter  les déboires stratégiques de la « guerre contre le terrorisme » menée en Iraq et en Libye sous des prétextes différents et qui ont laissé dans leurs sillages en plus des dégâts matériels incalculables, des sociétés fracturées, humiliées et traumatisées. Dominique Moisi dans son ouvrage « la Géopolitique des Emotions » cite l’humiliation parmi les plus fortes émotions qui expliquent les dynamiques dans les relations internationales et le comportement de certains Etats. Il affirme que c’est dans le monde Arabo – Musulman où le sentiment d’humiliation est le plus ressenti, souvent accompagné par une nostalgie d’un passe glorieux, en face d’un présent dénudé de tout espoir. Daech et ses associés semblent trouver dans le résiduel des  griefs inassouvis et de l’humiliation une source intarissable pour motiver ses recrues et alimenter sa campagne revancharde meurtrière. Le Secrétaire général des nations unies dans son tout récent rapport sur la prévention des l’extrémisme violent semble corroborer cette thèse.

 

Une politique de prévention de l’extrémisme violent demeurera élusive aussi longtemps que ces vérités inconfortables et bien d’autres ne sont pas prises en compte dans nos analyses et dans la recherche de solutions durables à ce fléau qui ronge le tissus  sociaux et gangrène les Etats.

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