Transition et instabilité
Dans un grand nombre de conflits domestiques, plus une crise est longue et plus ses effets pervers s’enracinent, affectant le tissu socio politique du pays et menaçant sa cohésion sociale et ses valeurs traditionnelles. Tandis que les structures économiques s’effondrent les appétits politiques s’aiguisent.
Les incertitudes rendent volatiles les situations politiques et encouragent les ingérences internes et externes dans une société désormais déboussolée. Le provisoire devient un fonds de commerce y compris pour des nationaux.
Le Mali, la CEDEAO, toute la région et la communauté internationale partagent un intérêt commun: mettre fin à la transition avec l’élection dès que possible d’un Président. Cette étape, la fin des incertitudes politiques, confortera les discussions de Ouagadougou et facilitera la reprise des travaux de la Commission Dialogue et Réconciliation.
Il n’y a pas de doute que ceux qui proposent le report des élections présidentielles ont de bons arguments : souci d’une plus grande légitimité en associant le maximum de nationaux à l’élection présidentielle, éviter la contestation des résultats, etc.
Menaces liées au report
Il est toutefois sage et prudent de se rappeler que le Mali se trouvait, il y a très peu de temps, au bord de l’abime: occupation brutale du nord du pays, structures étatiques et sécuritaires effondrées et mise en cause de l’intégrité du pays. Ces menaces sont toujours présentes aujourd’hui. L’intervention, en particulier de la France, a sauvé la situation pour le Mali et ses voisins. Mais provisoirement seulement si on n’y prend garde!
Le contexte actuel du Mali n’est certes pas propice à une élection idéale. Mais le pays ne se trouve pas dans une situation normale. Le report peut être tentant au nom de la légalité. A cet égard, les institutions actuelles de l’état – Présidence, Assemblée nationale, Haut Conseil des Collectivités – ne se trouvent elles pas au-delà de la durée de leurs mandats constitutionnels? Dans l’intérêt général elles ont été conventionnellement acceptées. Il doit en être de même pour la présidentielle de juillet. Un report de la présidentielle peut mener à un nouveau report et ainsi de suite.
Compte tenu du contexte actuel et aussi des élections antérieures depuis les années 1990, une large participation électorale n’est pas à l’ordre du jour. Les pourcentages glorieux des partis uniques ont disparu du Mali depuis 1992. Aujourd’hui, à situation exceptionnelle, réponse exceptionnelle.
En cherchant à imposer ¨le meilleur¨, c’est-à-dire reporter les élections à une période idéale, quand le ¨bien¨ est à portée de main, certains leaders maliens et observateurs extérieurs, prennent une position lourde de conséquences.
En définitive, il faut au Mali, et au plus vite, un gouvernement légal qui puisse travailler dans la durée et dans la clarté, capable d’aborder les problèmes structurels du pays.
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