Pour une action collective au Sahel

Depuis déjà quelques mois, on assiste à un démembrement  du Mali : coup d’état à Bamako, occupation du nord par les  Islamistes d’Aqmi, leurs alliés d’Ansar Dine et du MUJAO. Le MLNA, qui a lancé la rébellion, en janvier dernier, est débordé pendant qu’Arabes, Peuls et Songhaïs tentent de s’organiser.Les islamistes se sont installés  dans des villes comme Gao, Kidal ou Tombouctou et s’y organisent. Au Nigéria, Boko Haram poursuit sans relâche ses attentats meurtriers ciblés. Les cellules dormantes dans les autres pays de la région restent, par définition, invisibles. Le Sahel Sahara défraie, chaque jour, l’actualité africaine et internationale avec tous les risques de dérapage inhérents à une telle situation.

 

Crises et rivalités régionales

Tout n’est pas perdu, cependant, et il est encore possible de gérer la crise malienne avec succès. Pour ce faire, une approche régionale, collective et inclusive de tous les Etats concernés et intéressés,  doit être privilégiée. Naturellement, chaque crise est spécifique et il n’existe pas de formule unique de gestion des conflits. Cependant, il y a des analogies permettant d’en tirer les leçons afin de remédier aux risques d’une partition éventuelle du Mali.  Au stade actuel, il s’agit d’éviter l’exacerbation des rivalités régionales.

Dans des cas comme l’Afghanistan, le Yémen et la Somalie, le conflit est caractérisé par la compétition entre Etats voisins. Depuis 1990, les enjeux en Afghanistan sont marqués par la sourde rivalité entre le Pakistan et l’Inde. L’Iran n’est pas absent ni, dit – on, l’Arabie Saoudite. Au Yémen, le conflit récurent avec les Houthiyines est vu comme une confrontation indirecte entre l’Iran et le Royaume d’Arabie. En Somalie, l’Erythrée ne cherche même pas à masquer son jeu : y confronter l’Ethiopie voisine.

Dangers de l’internationalisation rapide

Au Mali, une internationalisation du conflit comporte un certain nombre de risques. En premier lieu, elle peut attirer un nombre toujours plus grand de médiateurs et autres acteurs extérieurs ; les sensibilités et intérêts, parfois contradictoires de ces missi dominici rendent une approche collective et inclusive plus difficile. En second lieu, elle tend à radicaliser et rendre plus visibles les groupes les plus extrémistes et, donc, à marginaliser les modérés ainsi que les représentants de la société civile. De tout ceci, il résulte un risque de perpétuation du conflit et de son extension aux pays voisins. Par ailleurs, l’internationalisation nourrit souvent la suspicion voire la compétition entre les puissances de la sous région, pour le plus grand profit des belligérants locaux et, à plus ou moins long terme, au détriment de tous les Etats concernés. A cet égard, les leçons de l’histoire du jeu solitaire de l’ancien régime libyen dans le Sahel méritent d’être  méditées par ses voisins.

Face à un danger pressant, il est souhaitable que les principaux  Etats du Sahel agissent différemment des voisins de l’Afghanistan, du Yémen et de la Somalie. Ils doivent arriver à collaborer de manière plus résolue en vue de régler, au plus tôt, la crise malienne et avec elle tous les autres conflits qui fragilisent la région. Sans une action collective, urgente et déterminée, de la part des trois ou quatre puissances régionales, en coopération avec leurs voisins, il est à craindre que la gestion du  Sahel  échappe aux gouvernements nationaux  et demeure, longtemps encore, un problème additionnel sur l’échiquier international.

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Basé à Nouakchott, le Centre 4S a une vocation régionale puisqu’il couvre une bande allant de la Mauritanie en passant par la Guinée, au sud, et jusqu’au Tchad et au Soudan, à l’est, après avoir longé l’Atlantique et traversé la savane. Ses centres d’interets sont la défense et la sécurité de la bande sahélo saharienne, la violence armée et le terrorisme, les rivalités pour le pétrole, le gaz et l’uranium, les migrations irrégulières dans et hors de l’Afrique, la contrebande de cigarettes, la drogue et les trafics humains, etc, l’environnement et les énergies renouvelables. Sa vocation est d’aider la région et ses partenaires internationaux publics et privés, aussi bien que ceux de la société civile, les universités, les Forums et autres groupes – à davantage collaborer pour assurer la sécurité et la prospérité de la bande sahélo sahélienne.

Pour plus d’information www.Centre4S.org

 

 

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