Communiqué de presse No 004 / 27.11.2011

 

Dans l’accomplissement de ces deux opérations en moins de 48 heures, les auteurs et leurs complices visent plusieurs objectifs: effrayer davantage les populations locales, intimider les gouvernements nationaux et étrangers, perturber le processus de démocratisation dans la région et bien entendu s’assurer une rentrée financière.

Le Centre transmet ses sincères condoléances à la famille de la victime allemande et formule l’espoir que tous les otages, nouveaux et anciens, retrouveront leur liberté de façon pacifique. Naturellement, les prises d’otages et la collecte des rançons ne peuvent se substituer  à une politique rationnelle.

Dans le Sahel l’ampleur et la diversité des menaces et des risques sont énormes. Parmi eux, quatre se distinguent par leur gravité: des  régions vastes, sous administrées et sous-peuplées,  trafics multiples y compris de drogues dures provenant d’Amérique latine et destinées à l’Europe et au Moyen Orient,  mouvements d’activistes radicaux, de nouveaux combattants endurcis et masses de jeunes sans espoir de travail et, enfin, au Nigeria, un énorme réservoir pour le recrutement et l’action du groupe Boko Haram. Comme dans d’autres régions troublées du monde, il existe évidemment au Sahel de nombreux liens entre les activités criminelles et la gesticulation idéologique.

 

Par ailleurs, la nouvelle vague d’actes de piraterie dans le golfe de Guinée fait craindre légitimement l’existence de liens entre celle-ci et les activités criminelles à terre. La jonction, en plein cœur du Sahel Sahara, des routes de  la drogue et des migrations irrégulières partant des ports de la côte Atlantique avec celles en provenance du Golfe de Guinée n’est guère encourageante. L’argent de la piraterie alimente ainsi les circuits criminels terrestres.

 

Si à moyen et à long termes, la disparition du régime de Kadhafi  contribuera à la stabilité, à court terme, elle comporte des menaces sérieuses qui doivent être minimisées. En particulier, le vide politique laissé par «le Guide» et le retour d’ anciens combattants bien aguerris et disposant de MANPADS – systèmes portatifs de défense aérienne – doit inciter les gouvernements de la région et leurs partenaires internationaux à prendre des mesures concrètes pour contenir les conséquences négatives de la crise libyenne.

 

Enfin, comme dans ses communications précédentes sur ces questions, le Centre appelle les gouvernements dans le Sahara Sahel à renforcer efficacement leur coopération afin de pouvoir répondre, d’une manière plus concrète, aux multiples défis auxquels la région fait face. La méfiance, les tensions politiques et la suspicion parmi et entre les Etats ne peuvent  qu’entraver l’indispensable coopération entre voisins confrontés à un même danger. Par ailleurs, blâmer les uns ou les autres pour manque d’efficacité ou essayer de monopoliser l’action diplomatique ou sécuritaire sont des pratiques sans lendemains dans un environnement socio politique toujours plus complexe.

 

 

Recommandations

 

Dans ce contexte troublé, le Centre 4s recommande ce qui suit:

 

. Pour aider à protéger ses récents investissements politiques et militaires, la communauté internationale et en particulier les principaux Etats membres du Conseil de sécurité devraient insister auprès du nouveau gouvernement de Tripoli en faveur de la réconciliation intérieure. L’Union africaine, la Ligue des États arabes et des gouvernements comme celui du Qatar peuvent aider dans cette entreprise. Un effet de contagion à partir d’un chaos en Libye aurait des effets durables et dévastateurs sur un Sahara Sahel déjà fragile et bien au-delà. Les nouvelles autorités libyennes doivent savoir qu’elles ont intérêt à avoir des voisins stables et prospères en particulier ceux du Sahel.

 

. À court et à moyen termes, des efforts supplémentaires doivent être déployés pour mobiliser des ressources afin d’aider en particulier le Niger en raison de sa vulnérabilité à une sécheresse endémique et à des pertes de revenus, conséquences directes de la crise en Libye. Dans une large mesure, le Tchad, le Mali et la Mauritanie ont besoin également d’assistance politique et financière.

 

. Des institutions de sécurité plus professionnelles, libérées des liens tribaux et claniques et d’autres types de connexions avec les éléments indésirables opérant dans le Sahel Sahara peuvent mieux assurer une stabilité durable. Dans le même temps, la lutte contre le terrorisme n’est pas une garantie pour la perpétuation de gouvernances non démocratiques ou de la poursuite d’une la corruption débridée. Plus précisément, le grave déficit dans ces deux domaines est parmi les causes profondes des mécontentements actuels et de la violence.

 

. Plus que la plupart des autres Etats de la région, les pays les plus concernés – Algérie, Mali, Mauritanie et Niger font certes face à des menaces graves et identifiables. Cependant, les autres pays, du Bénin au Burkina, du Cap-Vert au Tchad, du Niger au Nigeria, du Sénégal au Soudan et du Togo à la Tunisie et au Maroc, sont également intéressés à la stabilité de la région. En conséquence, aucun pays ou groupe de pays n’a la responsabilité exclusive de résoudre les problèmes de la région. Au contraire, la concurrence entre états ne ferait qu’aggraver davantage les relations diplomatiques bilatérales et l’objectif principal – la lutte pour la stabilité, deviendrait une question secondaire.

 

. Sur le long terme, la construction d’infrastructures physiques, notamment les routes, du Nord au Sud et d’Est en Ouest, à travers le  Sahara, est essentielle à la croissance économique, à la création d’emplois et à la génération de revenus. En outre, elle aidera les populations nomades de la région – Maures, Peuls, Touareg et d’autres, à être  mieux intégrées dans leurs pays respectifs. Enfin, à terme une plus grande décentralisation deviendra inévitable si les gouvernements veulent maintenir leur efficacité sur le terrain.

 

Basé à Nouakchott, le Centre 4S a une vocation régionale puisqu’il couvre une bande allant de la Mauritanie en passant par la Guinée, au sud, et jusqu’au Tchad et au Soudan, à l’est, après avoir longé l’Atlantique et traversé la savane. Ses centres d’études sont la défense et la sécurité de la bande sahélo saharienne, la violence armée et le terrorisme, les rivalités pour le pétrole, le gaz et l’uranium, les migrations irrégulières dans et hors de l’Afrique, la contrebande de cigarettes, la drogue et les trafics humains, etc, l’environnement et les énergies renouvelables. Sa vocation est d’aider la région et ses partenaires internationaux – publics et privés, aussi bien que ceux de la société civile, les universités, les Forums et autres groupes – à davantage collaborer pour assurer la sécurité et la prospérité de la bande sahélo sahélienne.

 

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